dimanche 12 décembre 2021

BBB : Bataille de Frœschwiller- Wœrth le 6 août 1870

Bataille de Frœschwiller- Wœrth le 6 août 1870

 

Un compte rendu période Second Empire ce n’est pas courant chez le Marius diront, avec raison, les mauvaises langues ! Celui-ci traite de la bataille de Frœschwiller-Woerth le 6 août 1870 jouée avec la règle bien nommée « Bloody Big Battles ! » de Chris Pringle, BBB pour les intimes et pas BB pour les petits coquins (BB, vous l’avez ?). Pour les plus incultes comme le Marius sur le sujet, mais tout de même curieux, un rapide tour de chauffe via le wiki de la bataille suffira amplement : 

WIKI Bataille de Frœschwiller 

 Notre reconstitution de la bataille a été jouée par le Marius et 3 de ses acolytes, JM, David (oui les anciens, on parle bien DU David revenu pousser en bonne compagnie des figurines), le tout sous la férule de notre redoutable Maître Ben, dont c’était la seconde partie avec BBB. Soit 4 grands novices autour d’une table de jeu donc, pour ce sanglant baptême du feu...

Coté troupes à diriger, j’écopais naturellement des bavarois peints par JM (logique, nous sommes voisins les suisses et les bavarois), alors que lui-même prenait en charge les troupes prussiennes reconnaissables à ce casque à pointe si caractéristique. Face à nous, Ben & Dave se sont répartis les français composés de nombreuses unités colorées de rouge, de blanc, de bleu foncé ou bleu ciel et coiffés de casquettes ou turbans. D’un point de vue vestimentaire, rien à dire, les grands couturiers, tendance militaire, étaient déjà français, même si les bavarois savaient encore se démarquer avec un uniforme saillant et bien visible.

 

Une bataille gagnée, c’est souvent une bataille bien menée avec un plan bien pensé !

Bon, quand c’est le cas des deux cotés ça s’annule et la victoire se décide alors sur des détails, des grains de sables dont on réalise l’impact souvent qu’après coup.


 En bon état-major prussien de 1870, le général bavarois von Hartmann et le Kronprinz Wilhelm de Prusse se sont réunis pour un – très – rapide conseil de guerre. Un survol des directives envoyées par von Molkte (conditions de victoire) nous a bien fait comprendre les enjeux de cette première confrontation :

capturer et tenir Reichsoffen,

capturer Froeschwiller avant 18h et le tenir à la tombée de la nuit,

Détruire l’armée française (maximum 4 unités d’infanterie encore en état de combattre).

 Va falloir non seulement conquérir du terrain, mais il faudra également « poutrer » en masse ces fiers mangeurs de fromage que sont les français. Tout un programme…

Les bavarois IIème corps devront donc effectuer un mouvement tournant sur l’aile droite à travers un terrain accidenté et boisé pour conquérir ces objectifs et en particulier Reichsoffen.

Les prussiens du Vème corps prussien, quant à eux, auront la lourde tâche de faire sauter le premier verrou central que représentent les environs de Woerth encerclé par de féroces vétérans français épaulés par une nombreuse artillerie sur la colline avoisinante.

Dans un second temps, les renforts en approche du XI corps prussien et les württembourgeois devrons eux, se déployer sur l’aile gauche pour, dans un grand mouvement bousculer toutes les troupes devant eux et terminer par la conquête de Reichsoffen en cas d’échec bavarois.

Le plan français, dont nous n’avions pas connaissance (mais que font les espions, impossible de compter sur ces gens-là), se dessinera rapidement. Une option agressive au centre avec pour objectif la prise de Woerth a été envisagé. Pour fonctionner correctement, Woerth doit être ensuite tenu à tout prix et le plus longtemps possible. Ça tombe bien, deux divisions de redoutables vétérans sont prêtes à en découdre et à punir des teutons trop confiants et encore peu nombreux.

Les Français prêts à reprendre Woerth

  Première constatation de von Hartmann, ses troupes bavaroises inexpérimentées ne sont pas suffisamment aguerries pour un combat rapproché prolongé avec les vétérans français. Heureusement, la présence de nombreuses troupes légères permet de compenser ce handicape en usant par le feu dans un terrain accidenté les français dont la qualité de tir à longue portée ne pourra pas s’exprimer pleinement.

 

L'aile droite bavaroise et ses troupes inexpérimentées face au terrain boisé.

Ouverture des hostilités :

Le brutal assaut français est récompensé par la prise de Woerth au grand désappointement des casques à pointe et à chenille (les bavarois, pour ceux qui ne sont pas des adeptes des accessoires de mode pour tenues seyantes bleu ciel). Sans renfort avant un bon moment, les allemands doivent prendre leur mal en patience pour ne pas être submergés ou battus les uns après les autres.

Prise de Woerth par les vétérans français, les prussiens sont repoussés, l'artillerie bavaroise déjà en difficulté et son infanterie qui avance péniblement dans les sous-bois.

  

L’enlisement au centre avec les infructueux assauts prussiens :

 

Les combats pour Woerth font rage, mais les troupes de chocs françaises font mieux que contenir les prussiens, ils les réduisent et repoussent.

Les batteries françaises y jouent un rôle essentiel et dominent les, pourtant fameux, Krupp.

Combats acharnés jusqu'au dernier homme pour Woerth !

On lâche rien coté français !


L’installation d’un nouveau flanc à gauche, l'arrivée du Kronprinz Wilhelm :

 

Aile gauche prussienne en cours de déploiement.

Les combats de l'aile gauche sont aussi rude qu'au centre, pas le temps de faire des échanges de tirs, il faut repousser les français.

Lentement mais sûrement, les français sont repoussés...

Non sans lancer de petits assauts de retardement qui s'avèrent suffisamment efficaces pour ralentir les prussiens.

Du canon Krupp qui cherche désespérément des cibles sans toucher ses propres alliés !

 

Interlude historique, la charge avortée de « Reichsoffen » par les cuirassiers français

La charge des cuirassiers Français de la Brigade Bonemains à Froeschwillers: Un dernier baroud d’honneur sacrificiel de Reichshoffen

Petite parenthèse historique qui ne manque pas de sel : Dans le secteur d'Elsasshausen, la brigade de cavalerie Bonnemains (1er, 2ème 3ème et 4ème régiments de cuirassiers) chargea sur un terrain accidenté un dizaine de bataillons d’infanterie allemande dans une héroïque mais vaine charge qui restera comme le chant du cygne de la cavalerie française sur les champs de batailles.

La charge des cuirassiers français

 Coïncidence ou volonté du général en chef français Mac Mahon de rejouer l’histoire, dans l’espoir fou de changer l’issue fatale ?, la brigade de cuirassiers s’est lancée à l’assaut des bavarois pour être vivement repoussé puis anéanti par la puissance de feu des buveurs de Pils (bière blonde légère et mousseuse pour les non initiés) pourtant réputée légère.

Pour la postérité en voici quelques photos pour immortaliser l’évènement… et pour ceux qui connaissent, n’hésitez pas à entonner la chanson populaire de votre enfance (si vous avez connu les fraiches soirées près du feu de de camps vous n’aurez aucun mal à retrouver l’air en lisant ces fameuses paroles :

C’était un soir la bataille de Reichshoffen,

Il fallait voir les cuirassiers charger.

Attention ! Cuirassiers ! Chargez !

d’une main ...

 

Ils ont chargé nos cuirassiers héroïques

À Reichshoffen, la mort fauchant les rangs

Attention ! Cuirassiers ! Chargez !

d'une main, deux mains…

Cuirassiers certes, mais face aux bavarois pour ce remake de Reischoffen.

 
La pudeur nous incite à ne pas vous montrer les conséquences du drame... et les cuirasses qui jonchent le sol.

L’impatience bavaroise :

 Le centre est épuisé, les bavarois doivent se redéployer pour couvrir ce qu'il reste et ne pas créer de brèche dans le front prusso-bavarois. Problème, la journée avance et les objectifs sont encore loin...

Les prussiens épuisés, les munitions viennent à manquer, l'assaut ne poura plus aboutir.

La brigade de renfort bavaroise est directement déroutée pour couvrir ce qu'il reste du centre prussiens, soit deux batteries d'artillerie mal en point sous la menace d'une brigade française très (trop?) avancée. Woerth est restée aux mains des français !

 En regardant de plus près sa carte d’état-major et le terrain sur lequel il se trouvait, le général bavarois en eu des sueurs froides ! Pourtant cartographe émérite, celui-ci avait confondu les objectifs à conquérir (Woerth & Froeschwiller) d’ici la fin de journée ! Von Moltke risquait de le faire passer en conseil de guerre dès l’ouverture de la campagne…

L'artillerie bavaroise renforcée, bien que malmenée, concentre son feu sur Woerth.

Flanqué sur sa gauche par le français en appui à Freischwiller, le bavarois doit forcer au centre, couvrir son flanc et sur sa droite pousser vers Reischoffen sans espoirs de renforts.

Dernière poussée sur son centre, le bavarois doit sortir du bois en n'ayant toujours pas conscience de la présence de Freischwiller sur sa gauche (qu'il confondait avec Woerth) car il n'avait de yeux que pour Reischoffen à droite.

Assaut bavarois sur Woerth et prise de conscience que la dite ville n'était pas Freischwiller, son objectif... Les cartes, faut toujours bien lire les cartes !


L’avance du flanc gauche prussien parvient enfin à réduire les français qui tiennent le terrain pied à pied.

Flanc gauche prussien à l’œuvre dans son mouvement tournant.
Les prussiens dévalent la colline à la suite des français redéployer derrière la rivière...

Mais la seconde colline, boisée, permet aux français de résister encore.

Le Kronprinz Wilhelm vient constater lui même la réussite de la prise de la colline boisée, il peut enfin respirer.

La course finale vers Reichoffen :

La course pour Reichsoffen et la capture de Froeschwiller par les bavarois et la chevauchée sauvage de la cavalerie prussienne du flanc gauche (impossible de laisser toute la gloire de la prise de Reishoffen aux seuls bavarois !).

Assaut final sur le dernier carré des troupes françaises dans Woerth, et à droite, en embuscade les uhlans pour assurer la capture des français en cas de fuite.

Si tout se déroule bien, tomberont d'un coup Woerth (tout à gauche, Freischwiller (au centre) et Reisschoffen à 17h...  notez la cavalerie prussienne du flanc gauche qui arrive tout à droite mais qui va se prendre le feu de l'artillerie que pointe un doigt vengeur français !

Woerth est tombé, les français en fuite se font capturer, Freischwiller également aux mains des bavarois...

Prise de Reichoffen à 17h par les bavarois qui s’y enterrent avec succès pour subir les assauts français de 18 à 19h

Reischoffen restera bavaroise à 19h, les français réduits à trois brigades d'infanterie fameliques se seront finalement sacrifiés pour rien, tout s'est joué à si peu.

 Destruction définitive des brigades française à 19h. La messe est dite. La campagne en France s’annonce comme une balade de santé pour les casques à pointe jusqu’à la galerie des Glaces de Versailles, mais à quel prix !

Notre Kronprinz  au chevet de notre pauvre Mac Mahon après la chute de Woerth...

  

Mot(s) de la fin (ou presque) :

Les prusso-bavarois ont finalement réussis, sur le fil, à obtenir la victoire complète (objectifs physiques et destruction de l'armée française) alors qu'ils couraient derrière le résultat pendant toute la bataille... Les 3 derniers tours de jeu furent pleins de suspense, la victoire s’étant jouée au tout dernier tour ! Preuve qu’il en est que les conditions de victoire dans BBB sont bien pensées et nous supposons, bien testées. La cavalerie fut à la hauteur de nos attentes en se faisant logiquement mettre en pièce. Unique petite erreur de jeu, nous avions oublié que la cavalerie ET l'artillerie attelée pouvaient faire un mouvement d'esquive (« evade move ») si une unité ennemie venait à se positionner dans les 12'' (voir page 14).

Dans l’ensemble, après un démarrage chaotique, les tours de jeu se sont déroulés plus rapidement pour arriver au bout de 10 tours de jeu à la conclusion de la bataille !  Rappelez-vous, seul Maitre Ben y avait déjà joué et la résolution du premier combat rapproché fut épique. Le temps pour nous de bien comprendre la méthode de calcul (la gestion des bonus/malus attaquant vs défenseurs) … Comme quoi, même de vieux briscards qui veulent faire vite, peuvent s’emmêler les pinceaux le temps de comprendre un point de règle.

Vous l’aurez compris, une chose est certaine, avec cette règle, il est possible de jouer rapidement de très grosses batailles et même de faire du multi-tables pour une petite campagne d'une journée ou deux pour un beau projet de club ! Cette dernière option va rester dans un petit coin de la tête du Marius et BBB pourrait même être une prometteuse alternative à Snappy Nappy pour un projet tel que la campagne française des 6 jours en 1814 ou une mini campagne guerre de sécession !

 

et pour jouer en 1 vs 1 une petite bataille c'est comment ? Bataille de Beaune la Rolande 1870 :

Pour ceux qui se demandent s'il est possible de jouer avec des effectifs moins importants le tout à 2 joueurs en une soirée de club, sachez que c'est tout à fait viable. Avec Maître Ben, nous avons rejoué la bataille de Beaune la Rolande le 28 Novembre 1870, avec de piètres troupes françaises peu mobiles, mal commandées mais nombreuses face à des prussiens peu nombreux mais bien retranchés et expérimentés, donc efficaces et réactifs. 

Une nouvelle course contre la montre qui s'est terminée par un match nul que les prussiens méritaient de gagner à la longue (sans la tombée de la nuit du dernier tour, le français perdait au moins l'un de ses objectifs ci qui lui suffisait pour perdre la bataille).

Encore une fois, l'activation des troupes est essentielle, il est donc vital pour le joueur offensif de bien relire les règles de traversée des troupes amies, histoire de ne pas se retrouver comme le joueur français, le Marius ici en l'occurrence, bloqué par d'autres unités ou penser être bloqué par certaines unités (en ordre de bataille vous pouvez traverser d'autres unités, ne pas l'oublier histoire de réaliser au mieux des roulements sur le front).

Quelques photos en vrac pour vous faire une idée. A BBB on se bouge énormément, même avec des troupes aussi lentes que furent celles de l'armée française.

Entrée des français par les routes en bas de la photo.

Le difficile déploiement français handicapé par une absence de commandement.

Le charme des embouteillages (une unité en colonne de marche sur route ne peut pas traverser une autre unité en colonne de marche sur route).

Assaut des 2 premières positions prussiennes par des français peu fiables.

Même dans ces conditions, le prussiens à résisté un moment.

La poursuite laborieuse des français... handicapés par les rivières et la faible expérience des gardes mobiles.

Enfin les renforts prussiens qui viennent ré-équilibrer la bataille !

Les positions finales, le mouvement tournant français a fait basculer la bataille de 90° mais le point central trop fortement défendu et fortifié (près de l'étang) n'a jamais permis au français de le conquérir et la cause de la perte de nombreux braves.

Je ne sais pas pour vous, mais nous on a bien apprécié la cohérence de cette règle très agréable sur son créneau. Et pour le Marius, la guerre de 1870 c'est un peu de changement d'air, histoire de laisser de coté, le temps de quelques batailles, ses habituelles marottes. 


lundi 11 octobre 2021

Présentation de Bloody Big Battles !

 Pour sortir un peu de nos marottes napoléoniennes du bicentenaire, le Marius en a profité pour découvrir le temps d’une partie de BBB, la bataille Frœschwiller 1870 et ses charmes du second Empire. Avant de détailler les faits d’armes de notre reconstitution en 2 versus 2, voici donc une présentation des règles utilisées, les bien nommées « Bloody Big Battles ! » de Chris Pringle.

 


Contexte et objectifs de "BBB" comme disent ses adeptes :

Après quelques années de sommeil post guerres napoléoniennes, plusieurs ruptures technologiques majeures (fusils, artillerie, arrivée des mitrailleuses, développement du train…) vont bouleverser à partir du milieu du XIXème siècle la manière de faire la guerre. Terminé la « sainte trinité du chifoumi napoléonien » (pierre/ciseaux/feuille) emblématique des guerres sous le 1er Empire.  

Dans le paysage ludique c’est le champ libre pour les grandes manœuvres de gigantesques armées en mouvement et des distances de tirs accrues. L’inconvénient, c’est qu’il faut encore plus d’espace et encore plus de figurines, sauf à changer l’approche de la modélisation des batailles.

Et c’est justement sur ce créneau que BBB (Bloody Big Battles !) vient apporter sa pierre à l’édifice, à savoir :

Pouvoir rejouer en un temps raisonnable (disons, quelques de heures à une journée de jeu) les plus grandes batailles de cette époque à l’échelle de l’armée avec pour ambition de donner une vue d’ensemble "Big picture" du champ de bataille en se concentrant sur les décisions stratégiques à prendre. Ici, ce n’est plus de la micro gestion tactique des unités mais bien le mouvement et le regroupement des troupes au bon endroit au bon moment qui compte le tout avec une feuille de référence, qui tient sur 2 pages, et regroupe quasiment toutes les informations essentielles pour pouvoir jouer sans retour régulier aux règles.

 Voyons ensemble, roulement de tambours, si cet ambitieux objectif affiché est atteint !

 

De la présentation de l’objet :

L’ensemble se compose d’un simplet livret (format A4) à couverture souple en couleur composé de 55 pages intérieures en noir et blanc le tout rédigé en anglais.

Les règles proprement dites tiennent en 25 pages avec quelques schémas explicatifs et exemples agrémenté d’illustrations d’époques. Les 29 pages restantes sont dédiées aux scenarios (ici tous consacrées à la guerre de 1870 entre la France et la Prusse). D’autres scénarios pour d’autres conflits (par exemple la guerre de sécession) existent et son facilement accessibles sur le web.

La règle, écrite par Chris Pringle et éditée en 2014, est donc assez éloignée des standards visuels que peuvent attendre les joueurs des années 2020. Nonobstant, l’ensemble clair, cohérent, va à l’essentiel et répond au besoin des joueurs sans bling bling et autres concepts à la mode du moment. Seul regret, l’absence d’un index détaillé même si la table des matières puis les paragraphes bien structurés, permet de rapidement retrouver un point de règles parmi ces 25 pages.

 

 Mécanismes de jeu :

 La représentation des troupes, échelle de jeu et de temps :

Une unité (brigade ou division) comporte plusieurs plaquettes de figurines (souvent entre 2 à 7) qui représentent chacune entre 1000 et 1500 hommes ou 24 à 36 pièces d’artillerie.

Les commandants dirigent des forces ((divisions ou corps d’armées) et permettent de donner un coup de pouce pour l’activation des troupes dans leur rayon de commandement.

Un pouce (le front d’une plaquette) représente entre 150 et 250 mètres de « terrain réel » pour un tour de jeu d’une heure ou ½ heure.

Pour les grandes batailles la table de jeu devra donc être conséquente mais toujours accessible pour la plupart des adeptes de ce format de jeu (240 cm x 120cm par exemple).

Les mouvements sont assez permissifs (échelle « stratégique » oblige) avec tout de même des nuances selon les 12 types de terrains représentés.

 

Déploiement en bataille des renforts prussiens

Le tour de jeu : Classique

Classique, on vous dit, donc du bon vieux « YOU GO/ I GO » de « bon aloi » comme dirait un célèbre rédacteur de la revue Vae Victis, avec tout de même quelques petites nuances pour le tir défensif qui rend l’ensemble un peu plus interactif (non, non, vous ne pourrez pas vous absenter pendant les mouvements de votre adversaire trop longtemps) :

  • Mouvements joueur A (avec esquive des cavaleries ou artilleries du joueur B)
  • Mouvements des commandants joueurs A
  • Feux défensifs du joueur B (possible à tout moment lors des mouvements du joueur A, donc même si une unité A sort de l’axe ou distance de tir, celle-ci subira tout de même un tir)
  • Feux offensifs du joueur A
  • Résolution des assauts du joueur A

 


L’activation, le cœur du système :

Ici l’ensemble se veut d’une prise en main facile, repose sur un système éprouvé mais épuré de la table d’activation (mais à base de 2D6) du vénérable Fire & Fury qui a fait ses preuves depuis près de 30 ans et qui fonctionne toujours aussi bien dans le cas présent.

Un tableau unique permet de savoir rapidement ce que l’unité peut réaliser ou non, selon si l’unité est en bon état ou en désordre (mouvement entier, ½ mouvement, immobilisé, recul…) le tout modifié par quelques bonus/malus pour la présence d’un commandant, du terrain traversé ou l’état de l’unité.

 


Le tuning des unités :

3 niveaux de qualité (élite, normal, mauvais) représentent les troupes. Malgré tout, différents attributs permettent d’affiner les unités et leur comportement. Par exemple Agressif, fragile, peu mobile, présence de tirailleurs etc.

Seconde moitié du XIXème sicle oblige, il existe 7 types d’armes à feu et 4 « d’artillerie » avec leurs distances de tir propres. Les adeptes du Krupp, ou des mitrailleuses apprécierons car la puissance de feu évolue selon la distance de tir et le type d’armement. Rassurez-vous, pour une bataille donnée, vos troupes serons souvent équipée du même arment et ces nuances ne vous perturberont plus après quelques tours de jeu. Petite subtilité, la cavalerie et l’artillerie peuvent se désengager si une unité ennemie approche.

Les formations sont simples,

  • en bataille (tous sur une même ligne)/artillerie déployée,
  • en masse (sur 2 rangs de plaquettes)
  • ou en colonne  marche/artillerie attelée.

Les unités perdent des socles (qu’elles peuvent lentement récupérer si elles ne bougent pas) et sont éliminées lorsqu’il ne leur en reste plus qu’une. Le désordre et l’épuisement impacteront également fortement le comportement des troupes.

Les commandants ne servent qu’a donner un rayon de commandement (pour un bonus d’activation au mouvement et à la récupération de désordre). Tous les généraux ne sont pas forcément représentés, plus une armée aura de bons généraux actifs, plus vous en aurez dans votre armée. Ainsi, certaines armées seront plus mobiles et réactives. Cela fonctionne plutôt bien pour ces armées à base d’états-majors plus professionnel et la manière de commander depuis l’arrière. Mais si vous voulez jouer 1er Empire (voir guerre de sécession) il faudrait trouver quelques palliatifs pour rendre aux généraux leur glorieuse place. Pour d’autres conflits ce n’est franchement pas nécessaire tant la plupart des joueurs connaissent mal les protagonistes (le Marius en tête).  

 

Les vagues prussiennes forment des bouchons sur le flanc gauche

Jouabilité :

Vous l’aurez compris, la jouabilité est assez exemplaire et surtout vous pourrez aussi bien y jouer en 1 versus 1 qu’en équipes de plusieurs joueurs pour un plaisir accru ! A ce titre, BBB se prête parfaitement au multi-joueurs (tour de jeu YOU GO/I GO fluide et rapide) et au jeu en campagne.

Avec quelques rares cas particuliers de règle (épuisement des munitions…), la seule « complexité » réside dans le feu défensif qui peut être appliqué sur des troupes du joueur actifs qui ont quitté la zone de tir ou se sont abrités à la fin de leur mouvement. Des joueurs débutant risques d’être perturbé sur ce point pas toujours évident à appréhender.

Second point, la résolution du combat au contact doit être bien lu pour la manière d’appliquer les bonus ou malus chez l’attaquant et le défenseur.

Passé ces 2 points l’ensemble est d’une grande fluidité surtout pour des joueurs expérimentés.

Petite contrainte pour les joueurs débutants, sachez que vous ne trouverez pas de listes d’armées et de système à points pour créer vos armées mais dans BBB tout est tourné vers les scénarios pour rejouer des batailles historiques avant tout. Exit le jeu en tournois ou partie de rencontre avec budget donc.

Les sanglants combats pour la prise de Wœrth !

 

Historicité :

A cette échelle, c’est plutôt au niveau des scénarios que « l’ambiance historique » se ressent. Et Avec 9 batailles majeurs, de Froschwiller à Le Mans en passant par Gravelotte et Sedan, il y a de quoi se faire plaisir avec des Ordres de Bataille détaillés, des conditions de victoires particulières bien détaillées (voir avec des conditions alternatives) et une carte, certes pas forcément des plus belles mais toujours précise avec toutes les informations requises pour jouer (terrain, placement et renfort des unité, orientation, échelle etc). Les batailles peuvent aussi s'enchainer dans un mini mode campagne avec, selon le vainqueur de la bataille précédente, des conditions de victoire légèrement différentes. 

Nous avons parlé de la guerre de 1870 mais n’oubliez pas que la règle se prête parfaitement à d’autres conflits, Guerre de 1866 entre la Prusse et l’Autriche et guerre de sécession en tête mais pas que ! En revanche, si les scénarios n’existent pas, il vous faudra faire un (passionnant) travail de recherche ou d’adaptation de scénarios provenant d’autres règles. Et c’est bien là le plaisir de rejouer des batailles historiques passées, pouvoir aller plus loin que le simple geste de pousser quelques figurines puis jeter des dés lors des combats ! Plus ce travail de préparation est bien fait, plus le sentiment d’historicité sera grand.

 



 

 

 

 

 Supports et suivi :

L’une des forces de BBB est indubitablement le support et suivi fait par l’auteur et la communauté. Certes la règle n’est pas produite par un grand éditeur du marché mais cela est largement compensé par les nombreux scénarios disponibles sur le web. Ceux-ci sont au même format (Présentation, carte, mise en page) que ceux de la règle ce qui en facilité la lecture à l’usage.

Il existe également des suppléments de scénarios « Bloody Big European Battles ! » et Bloody Big Balkan Battles campaign book (BBBB) pour vous changer les idées si vous êtes déjà venu à bout des 9 dans le livre de règles.  

Où trouver ces beaux scénarios ?

  • Commencez donc par le blog de Chris Pringle (l’auteur) :

https://bloodybigbattles.blogspot.com/

  •  puis le groupe IO (en anglais) dédié à la règle BBB pour vos questions :

https://groups.io/g/bloodybigbattles/

  •  Une fiche de référence en français est même disponible chez des joueurs français qui connaissent l’auteur :

https://2d6.fr/?p=4918

  • ou sur le groupe IO :

https://groups.io/g/bloodybigbattles/files/BBB%20Charts%20French%20version%202020-04-15.pdf

 

Exemple de la première page (sur 3) d'un scénario de la communauté.

 Le mot de la fin :

La première chose qui saute aux yeux après lecture de la règle et une bataille jouée (Froeschwiller 1870 à 4 joueurs en quelques heures pour 10 tours de jeu), c’est que les BBB répond exactement à ses objectifs affichés. Et c’est assez rare pour le souligner. Concrètement, vous allez bien pouvoir rejouer facilement des batailles avec largement plus de 100 000 hommes, le tout dans un temps de jeu raisonnable pour arriver à terminer la bataille et ainsi avoir un vainqueur indiscutable en une dizaine de tours de jeu, même avec des joueurs qui ne connaissaient pas la règle au préalable (dans ce cas un arbitre ou joueur qui maîtrise la règle est tout de même recommandé).

Coté stratégie et technique de jeu, avec BBB, vous allez focaliser votre attention sur un plan de bataille globale, sur la manière de déplacer vos troupes pour qu’elles arrivent dans les temps sur le point clé de la bataille et apporter le surnombre dans les combats tout en essayant de réduire au maximum le « traffic jam » (les embouteillages) qui fait le charme de ces batailles titanesques. Vous allez pouvoir joueur avec des joueurs novices ou non et tout le monde sera « dans la partie » rapidement si elle est bien pilotée.

Notez tout de même qu’avec des unités à cette échelle il vous faudra pouvoir les reconnaitre et que pour cela de petites étiquettes descriptives (labels chez nos amis anglo-saxons) à coller ou poser derrière les troupes seront nécessaires, ce qui oblige un petit travail de préparation et ne plaira pas à tout le monde (les joueurs de Fire & Fury seront dans leur élément, eux). Autre possibilité, des fiches (rooster) pour les unités peut alléger la présence de ces petites étiquettes sur la table de jeu pour un visuel encore plus sympa.

Pour le Marius, dont la guerre au XIXème siècle n’est pas la passion première, BBB apporte suffisamment de plaisir de jeu et « d’historicité » pour participer à de nouvelles parties endiablées. En ça, l’objectif pour le joueur que je suis, est atteint et nous attendons avec plaisir le prochain défi à relever avec BBB ! Clairement, la règle est bien rodée, efficace et permet au joueur de se concentrer sur l’exécution de son plan. Et pour ceux qui veulent apporter des modifications ou règles supplémentaires, le système est suffisamment solide et épuré pour accepter cet ajout de profondeur si c’est bien pensé (nous pensons ici par exemple à donner plus d’importance aux commandants comme dans « Altar of freedom », pour la guerre de sécession pendant laquelle la personnalité des généraux a eu un véritable impact).

 

De la partie :

Vous trouverez notre bataille Frœschwiller- Wœrth le 6 août 1870 dans l'article du lien suivant:

http://unmariussinonrien.blogspot.com/2021/12/bbb-bataille-de-frschwiller-wrth-le-6.html 

Que va donner la fameuse charge de Reichshoffen des cuirassiers français ?