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lundi 29 février 2016

La Brigade Liebardt à la bataille de Mohilev 1812 (L3C)

Voici en quelques chiffres, le WE de reconstitution de la bataille de Mohilev 1812 qui a eu lieu chez F&S les 20 & 21 février 2016 & (partie 2) :
 13 joueurs, un arbitre, 11 tables, une règle 1er Empire tactique : Les 3 couleurs (L3C).
Et au milieu de tout ce monde votre humble serviteur dans la peau du Colonel russe Liebardt.


Vue générale de la table principale, à gauche les généraux russes, à droite les vils français

Mais plutôt que de suivre la bataille dans sa globalité nous allons plutôt suivre les événements comme les a vécu et rapporté dans ses Mémoires le Colonel Liebardt, jeune officier russe en charge de l'extrémité de l'aile droite.


Extrait des notes à l'usage des Mémoires militaires du Général Liebardt Brigadier de la 12ème Division du Corps d'Armée du Général Rayevski concernant les événements survenus lors la bataille de Mohilev en 1812.


L'affaire commença pour nous par un matin chaud et poussiéreux de juillet 1812 lorsque le Prince de Bagration donna l'ordre au Général Rayevski, commandant du 7ème Corps d'Armée, de reprendre le contrôle du village de Fatova aux mains des français. Le dit village de Fatova se trouvait judicieusement situé au débouché de la route traversant la grande forêt menant à Mohilev et seul chemin praticable par notre artillerie et nos bagages.

 Moi même commandant la première Brigade de la 12ème division Paskiewitch, je fus finalement affecté directement sous les ordres de notre chef de Corps Rayevski à la couverture du flanc droit de notre réserve d'artillerie composée de 72 bouches à feu, dont un grand nombre de pièces de 12£ qui faisaient en ce temps la renommée de notre armée.
 

 La seconde tâche qui m'incombait consistait à reconnaître la forêt sur notre flanc droit et d'en chasser, si possible, tout français embusqué afin de ne pas voir l'armée contournée et prise en tenaille ceci au risque de laisser notre grande batterie et nos bagages en fâcheuse posture.

Pour ce faire, le Général Rayevski m'adjoignit, en complément de ma Brigade (régiments de mousquetaires Ladoga & Poltova chacun à 2 bataillons), un bataillon du 6ème Jaëger et 2 escadrons de ces terribles Cosaques du Don.
Mais comme nous allons le constater par la suite, le régiment de Poltova, s'égarant dans la forêt lors de sa marche vers le champ de bataille, se déporta sur le flanc gauche de la grande batterie et passa de facto sous le contrôle des généraux Kolubakin et Rayevski me privant ainsi de 2 solides bataillons sur le flanc droit exposé.

La première heure se déroula sans contre temps majeur, les français débusqués reculant face à nos manœuvres de débordement menés à l'extrémité du dispositif par nos fier cosaques et finir même par nous céder la rive droite du ruisseau ainsi que toute la ligne de crête surplombant Fatova au Sud.


Pendant ce temps nous parvenait, depuis la grande forêt au centre du dispositif du Prince Bagration, les bruits des nombreux échanges de coups de feu. Pour certains, la bataille venait déjà de s'engager et la journée risquait d'être longue.


La grande batterie de droite, promptement déployée et protégée sur son flanc par notre brigade, fut la première à entrer en action. Ses canons crachaient un déluge de plomb sur les troupes françaises retranchées dans Fatova et permettait ainsi à la grande batterie de gauche, embourbée dans ses lentes manœuvres, de se déployer sans risque de contre attaque ennemie malgré le feu d'interdiction d'une batterie française postée dans l'axe de la route principale à Fatova.
 

Alors que la grande batterie de gauche, sous la couverture des bataillons de la Division Kolubakin devra attendre encore une heure avant de pouvoir ajouter sa puissance de feu à celle de notre aile.


De notre coté, la première étape de notre mission de protection et de « flancage » était donc déjà atteinte à 10h30.
Les français reculaient en nous laissant maître de la rivière et par conséquent de son passage !


Pourtant, à la pointe centrale de l'attaque de notre Corps d'armée la résistance français continuait à harceler nos vaillants soldats qui réparaient le pont de Fatova rendant leur tâche difficile. A cela s'ajoutait l'impatience et l'inquiétude croissante de notre réserve d'infanterie impuissante car bloquée dans le vallon en face de Fatova.
 

 Embrassant d'un coup d’œil la situation et anticipant les ordres à venir de mon Chef de Corps Rayevski, j'en profitais pour faire descendre du promontoire mon valeureux 1er bataillon de Mousquetaires de Ladoga afin qu'il puisse se déployer sur la rive française. Ainsi fait, je pouvais facilement couvrir la périlleuse traversée du vif cours d'eau par nos hussards.
En effet, un premier assaut de Jaëger depuis le bois du vallon sur le moulin de Fatova se solda par un repli en bon ordre mais exposait nos hussards trop avancés, acculés et en mauvaise posture, à une contre attaque française.
En libérait l'espace pour que la cavalerie puisse manœuvrer je fis immédiatement occuper avec le second bataillon de Ladoga la position de « flancage » de la Grande Batterie rassurant par cette avance nos artilleurs. 
  
  
Pendant ce temps, le 1er bataillon du 6ème Jaëger, affecté à ma brigade, traversait lui aussi la rivière à la suite de nos cosaques toujours en pointe.


 La redoutable puissance de feu de nos 2 grandes batteries combinées en tirs croisés et judicieusement dirigées par le Général Rayevski obligea même le Général Compans à s'éloigner de la ligne de front pour s'abriter dans les dernières maisons de Fatova perdant ainsi, par sa couardise toute française, le contact visuel avec l'évolution de la situation.
 

Voyant cette fuite de l'état-major ennemi depuis mon promontoire excentré, alors que mon chef de corps, de par la fumée des batteries et sa position trop centrale ne pouvait pas connaître cet événement, je décidais de pousser notre avantage en lançant mon valeureux 1er mousquetaire de Ladoga pour enlever le moulin encore tenu par des voltigeurs français. Ce faisant, l'ennemi ne pourrait plus contester la réparation du pont qui bloquait la traversée de la digue par nos troupes.

La manœuvre était risquée car il fallait l’exécuter promptement et ne pas échouer, mais rien n'arrête un bataillon de Mousquetaires russes lorsqu'il est animé par la plus grande des ferveurs et le 1er Ladoga chassa sans pertes les derniers français hors du moulin et des maisons mitoyennes. Il fut à notre grande satisfaction le premier à investir Fatova sous les yeux des autres régiments et artilleurs en liesse !


Pour autant je n'en oubliais pas ma mission première de couverture de la grande batterie et le contrôle du bois Sud.
Mes cosaques et Jaëgers ayant sécurisé la rive gauche de la rivière je fit déployer le second bataillon du régiment des mousquetaires de Ladoga en lisière de forêt sur la rive française toute en surveillant la poursuite.
Ce faisant, il ne me restait plus aucun bataillon directement ancré à la droite de la grande batterie. C'est à ce moment là que revint mon aide de camps en m'annonçant que mon second régiment, celui des mousquetaires de Poltova, avait emboîté le pas aux troupes qui combattaient dans la grande forêt sur le flanc gauche de la grande batterie !
Malgré le contrôle du flanc droit de l'armée, nous n'avions donc plus de réserve pour protéger directement nos puissantes pièces de 12£ dans le cas d'une contre attaque désespérée des français à travers les bois !

Submergé mais pas battu, l'intrépide général français Compans lança, dans une dernière attaque désespérée, sur mes troupes dans les bois son régiment à l'extrémité de son flanc.


 Gardant notre sang froid, Je laissais le glorieux 1er bataillon de Legoda reprendre la marche avec le reste du Corps de Rayevski, ces braves par leur action décisive de la prise du moulin de Fatova l'avaient bien mérité.
 

 Malgré tout, conscient de la supériorité des français dans les combats forestiers ou en terrain accidenté et me tenant à mes ordres du matin, je fis donc faire demi tour à mon second bataillon de mousquetaires et au 6ème Jaëger afin de sécuriser définitivement le front de notre armée derrière la rivière et en haut de la colline à droite des batteries d'artillerie. Bien m'en pris car le Général Rayevski n'hésita pas à m'envoyer un aide de camp pour me rappeler à mon devoir et ma mission première. Mais conscient de la faiblesse relative de notre flanc il détacha tout de même à mon service 2 escadrons de hussards empêchant toute tentative de fuite de l'ennemi.

Nous étions donc suffisamment nombreux pour fixer et attirer ces 2 bataillons français enfermés dans les bois et toujours encadrés par nos cosaques les empêchant de rejoindre le gros de la bataille au centre du dispositif. La reddition imminente et sans conditions de ce bon millier de vétérans français ne faisait maintenant plus aucun doute avec l'arrivée depuis Salavenka du général de division Paskiewitch, sonnant pour eux le glas d'un acte déshonorant et une fin précoce de la guerre.
C'est sur ce second fait d'armes atteint par de savantes manœuvres que se terminait glorieusement pour nous la bataille de Mohilev.
 

 Le plus remarquable, lors de cette brillante journée, c'est que nous avions aucune perte humaine à déplorer parmi les troupes sous notre commandement.
Seuls quelques blessés étaiement à signaler dont :
  • 1 blessé léger au doigt par écharde (en ouvrant la porte du moulin de Fatova) dans le 1er bataillon de Ladoga
  • 3 rhumes dans le second bataillon de Ladoga lors des traversées incessantes de la rivière

Tout cela fut possible grâce à la clarté et la rigueur qu’insufflaient les ordres de notre Chef de Corps aux troupes sous sa direction ainsi que la confiance donnée aux jeunes officiers désirant briller sous ses ordres.

Ces valeureux faits d'armes sont à remettre en perspective avec la bataille complète pendant laquelle il y eu de nombreux combats bien plus sanglants, en témoigne les pertes :
Armée russe du Prince de Bagration :
Total pertes : 1495 hommes : 1197 fantassins et 298 cavaliers

Ier Corps d'Armée français du Maréchal Davout :
Total pertes :1917 hommes (1224 fantassins et 693 cavaliers) et 9 pièces d'artillerie